Le réseau de Cercy-la-Tour

Deux 230 A (Fulgurex) s’époumonent en tête d’un long train de marchandises sur la transversale Chagny-Nevers.

Nous allons faire un voyage dans le temps le long de la transversale Chagny-Nevers grâce à la superbe réalisation de Gilles Lafouge qui nous a aimablement ouvert les portes de son réseau. En voiture pour 1937…

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Paris-Lyon-Méditerrannée

M
e croirez-vous lorsque je vous aurais dit que c’est là le premier réseau de notre modéliste ? Il n’y a pas eu de petit réseau, de diorama d’essai, etc. Tout au plus un faux départ avec celui-ci, et encore bien avant que le décor soit commencé ! Lorsque Gilles débute son aventure en 2006, les choses lui paraissent d’emblée simple quant au choix de son cahier des charges. Son réseau sera situé dans la région où il vit, comportera une gare principale, une double voie, une antenne à voie unique. Le faux départ évoqué sera surtout lié à une version initiale plus modeste, qui ne faisait pas le tour de la pièce. Contraint par cette décision dans son ambition, il se ravisera rapidement devant un alignement des planètes favorables et la bienveillance de son épouse. Un projet plus ambitieux se déroulera donc le long de la totalité des murs de cette belle pièce. Car notre ami a choisi de ne pas mettre la charrue avant les boeufs. Il voulait pouvoir travailler et profiter de son réseau dans un cadre agréable et s’est attelé avant tout à préparer cette belle surface de 40 m2. Une fois celle-ci prête, le réseau va pouvoir se déployer. Il est prévu d’emblée sectionnable. « Déménageable », au cas où, comme le précise Gilles. Mais, une fois au pied de l’ouvrage, il fallut préciser les choix. Si une rencontre peut être considéré comme décisive quant à l’affirmation de ses options, c’est celle avec Henri Cibert. Ce dernier, PLM-iste convaincu, va aider notre ami à faire le bon choix : PLM 1937 ! Pour qui connaît Henri, c’est « le » choix évident. Mais cela va imposer à notre impétrant des challenges et des contraintes. Certes, le matériel roulant est assez abondant sur le marché, mais souvent en livrée SNCF, les véhicules routiers de l’époque peu répandus, les recherches documentaires à priori moins aisées, et ainsi de suite. Qu’à cela ne tienne, il est malgré tout rapidement convaincu, enthousiaste même. Et pour le lieu ? Cercy la Tour, sur la transversale Chagny-Nevers s’impose aussi assez aisément. Cette gare coche beaucoup de cases sur la liste des envies de notre modéliste. Il faut préciser que ce ne sera pas une transposition totalement conforme à l’originale, les contraintes de place ayant amenées à quelques adaptations qui ne dénaturent pas le site. Le BV est par exemple traité dans son état d’origine, avant ajout et adjonctions diverses. Le plan de voies est adapté, forcément un peu comprimé, le dépôt voit son emplacement inversé par rapport à la réalité. Peu importe, en fait, car l’essence de cette gare et de la région environnante, l’atmosphère de cette ligne si particulière du Paris-Lyon-Méditerranée en 1937 sont bien présent. Et c’est là l’essentiel…

Les amis et le hobby

C’est une histoire que vous avez peutêtre déjà lu dans les revues mais qui se vérifie une fois encore… Notre hobby est souvent catalogué comme un loisir solitaire, peu prisé par nos épouses, parfois rejeté par notre progéniture, il demande de l’abnégation…ou des amis !

A la petite annexe de Cercy la Tour, une 140 G (Fulgurex) côtoie une 230 A (Kit Loco-Diffusion montée par Yann Baude). Notez
la modestie des installations mais surtout la superbe aiguille triple PLM construite de toutes pièces par Henri Cibert.

Pratiquer ce loisir autour de son réseau personnel avec des amis est une bonne solution, qui n’est d’ailleurs pas antinomique avec l’implication dans un club. On échappe à l’enfermement voire à la désocialisation (si, si, cela n’est pas réservée qu’aux « gamers » !), on partage de vrai moment de convivialité, les moments de doutes sur le « que faire » et « comment faire » trouvent ainsi souvent des épilogues heureux. Et puis soyons réaliste, on ne peut savoir tout faire bien, et demander des conseils ou de l’aide ne nuit pas, bien au contraire. Et c’est ce que Gilles a bien compris. Pour lui, le modélisme ferroviaire, c’est aussi du partage. Passer une après-midi, avec un ou des amis autour d’un chantier ou d’un projet fait partie de l’aventure. Et il sait agglomérer les talents autour de lui. Il y a d’abord Laurent Chelminiak, cheville ouvrière de gros ouvrages comme le viaduc de Cormot et le pont métallique, Henri Cibert dont nous avons déjà évoqué l’influence, mais aussi Philippe Guiffard pour certains des bâtiments de ville en construction, Didier Lemaitre pour les fonds de décor, Philippe Barroin pour le TCO, et j’en oublie sûrement… 

Une vue plongeante sur l’annexe dont l’emplacement s’adapte au contrainte de notre modéliste. En réalité, elle se situe de l’autre côté de la gare mais Gilles n’a pu la placer élégamment que de ce côté-ci.

Pratiquer ce loisir autour de son réseau personnel avec des amis est une bonne solution, qui n’est d’ailleurs pas antinomique avec l’implication dans un club. On échappe à l’enfermement voire à la désocialisation (si, si, cela n’est pas réservée qu’aux « gamers » !), on partage de vrai moment de convivialité, les moments de doutes sur le « que faire » et « comment faire » trouvent ainsi souvent des épilogues heureux. Et puis soyons réaliste, on ne peut savoir tout faire bien, et demander des conseils ou de l’aide ne nuit pas, bien au contraire. Et c’est ce que Gilles a bien compris. Pour lui, le modélisme ferroviaire, c’est aussi du partage. Passer une après-midi, avec un ou des amis autour d’un chantier ou d’un projet fait partie de l’aventure. Et il sait agglomérer les talents autour de lui. Il y a d’abord Laurent Chelminiak, cheville ouvrière de gros ouvrages comme le viaduc de Cormot et le pont métallique, Henri Cibert dont nous avons déjà évoqué l’influence, mais aussi Philippe Guiffard pour certains des bâtiments de ville en construction, Didier Lemaitre pour les fonds de décor, Philippe Barroin pour le TCO, et j’en oublie sûrement… 

Une vue plongeante sur l’annexe dont l’emplacement s’adapte au contrainte de notre modéliste. En réalité, elle se situe de l’autre côté de la gare mais Gilles n’a pu la placer élégamment que de ce côté-ci.

La 230 A citée précédemment est à la « table à charbon » où les hottes attendent de remplir le tender.

Une 231 D (REE) sur Chagny-Nevers ! A la suite d’une interception temporaire au tunnel de Blaisy, cet Express pour le sud de la France est détourné par la transversale. La composition de ce train comme tous les autres circulant sur le réseau est conforme au Livret de Composition 1937 du PLM.

Une 231 D (REE) sur Chagny-Nevers ! A la suite d’une interception temporaire au tunnel de Blaisy, cet Express pour le sud de la France est détourné par la transversale. La composition de ce train comme tous les autres circulant sur le réseau est conforme au Livret de Composition 1937 du PLM.

Astuces de modélistes : perspectives et fuite…

Plusieurs zones font appels à la perspective forcée pour donner plus de profondeur. C’est le cas ici pour la rue principale de Saint-Sauveur où les bâtiments sont construits à des échelles décroissantes.
Ces vignes accrochées aux flancs des coteaux sont traitées elles aussi à échelle réduite (1/160 environ). Ce sont des morceaux de Scotch Brite peints à la bombe afin de simuler les couleurs d’automne, période de vendange.
Il convenait de masquer la fuite de la ligne à voie unique autrement qu’avec le sempiternel tunnel. Gilles a utilisé pour ce faire des arbres Sylvia SDD, des branchages naturels et du Zeechium pour les parties basses. Devine t-on la présence d’un train au travers de cet épais rideau végétal ?

Une 230 C (modèle unique Mecanic Train/Eric Seibel) entrant en gare de Cercy remorque une rame typique de la ligne à la composition éclectique. Ainsi en queue de ce convoi mêlant matériel TY et OCEM, après une mixte-fourgon C4D, prennent place un couvert et un réfrigérant !

Pour autant, Gilles, s’il sait demander aide et conseil, est un fervent pratiquant. Il aime autant toucher au matériel roulant qu’aux bâtiments ou au décor. La grande majorité de ce qui est visible en ce dernier domaine sur le réseau est dû à son talent. Souvent considéré comme la partie facile par certains, ce n’est pourtant pas un art mineur. Passer d’une scène à l’autre élégamment, ménager des transitions, créer des perspectives pour les arrières plans, reproduire les paysages d’une région donnée, et réussir tout ceci comme Gilles nous le montre ici n’est pas aisé.
Les bâtiments ? Il s’y sent aussi à l’aise comme le montre le très beau BV de Cercy ou la transformation de la ferme au pied du viaduc sur base Architecture de France. Mais le matériel roulant sait aussi éprouver sa patience. Il n’hésite pas à se lancer dans de complexes transformations comme par exemple une voiture mixte-fourgon à trois essieux qui débuta par une caisse MMM-RG, rééquipée d’un châssis issu d’une voiture à trois essieux modernisées LS Models, les dossiers étant détaillés, les marchepieds refait en laiton, et le tout paré d’une vigie avant d’être repeint !

Ce magnifique viaduc reproduit le modèle réel dit de Cormot (près de Nolay) sur la ligne Santenay-Epinac. Il a été construit par Laurent Chelminiak en plâtre résine. La composition est typique des omnibus PLM avec une 140 K (Lemaco), un fourgon à trois essieux (Loco Diffusion), des voitures ex-DR (Roco) entre lesquelles est intercalée une antique voiture PLM à deux essieux (MMM-RG).

La gare de Cercy, au centre d’une petite étoile, possède une petite 030 AT (modèle Model Loco modifié par Guy Boileau) qui manoeuvre sur les voies de débord

Une 140 E (Mecanic Trains) tracte un train de tombereaux quittant la ligne principale et se dirige vers Tanlay.

Du matériel roulant patiné…

Gilles ne souhaite faire circuler sur son réseau que du matériel patiné. La vue du faisceau de la gare de Cercy en témoigne. Il utilise pour ces wagons diverses techniques, suivant l’humeur du moment. Les couverts par exemple sont traités suivant les conseils de Dominique Bureau à l’aide d’un jus de peinture rouille à l’aérographe, divers produits AK Interactive, et des terres à décor. Les châssis reçoivent pour leur part un voile de peinture Crasse d’origine AMF 87 ou Decapod.

Cette Pacific PLM (Modelbex) a été patinée, elle, suivant une technique popularisée par Guy Labbez (entre autres dans ces colonnes) à base de jus de peinture Humbrol dilués à l’acétone et appliqués à l’aérographe.

Trois vues générales du réseau avec de gauche à droite : La gare de Cercy la Tour, la partie avec la voie unique et la gare de St Sauveur, la zone avec la double voie et sur la droite l’amorce du viaduc de Cormot.

La petite gare de St Sauveur (le BV a été construit par Yann Baude) sur la branche à voie unique qui parcourt une partie du réseau.

Nous avons bien là affaire à un modéliste complet qui ne s’interdit aucune des facettes de notre hobby, et c’est tant mieux. Gilles a, certes, encore un peu de chemin à parcourir pour aboutir à la finition complète de son réseau. Le ballast est à finir, des bâtiments à compléter, du décor à traiter, il reste du matériel à patiner. De beaux projets doivent encore venir compléter l’existant comme par exemple un garage automobile très Art Déco à l’entrée de Cercy.
Regrette-t-il un seul instant les choix exigeant faits au début de son projet ? La réponse fuse instantanément : « Absolument pas ! ». Parfaitement satisfait avec le thème retenu et ses challenges, il lui reste donc de belles heures de modélisme à venir que nous espérons pouvoir partager avec vous. #

Infos réseau

Gilles Lafouge aux commandes.

Nom : Cercy-la-Tour
Thème : Ligne PLM Chagny-Nevers en 1937
Echelle : HO
Dimensions : 8,5 m X 4, 5 m
Structure : Caisson en contreplaqué de 10 mm
Hauteur au niveau du plan de roulement : 1,30 m
Rayons de courbures : 2 m en plaine ligne, 1,30/1,40 en entrée de gare, 1,10 m sur le faisceau
Rampe maximum : 4% (en partie cachée)
Voie : Peco
Aiguillages : Tillig/Weinert re-détaillés avec des pièces du club Proto 87, construction intégrales (Henri Cibert).
Ballast : Sylvia SDD (brun rosé) pour la voie principale, Woodland Scenics grain médium
Bâtiments : Construction intégrale (BV de Cercy), kits Architecture et Passion (abri de quai, halle marchandise) ou Architecture de France (Dépôt, Ferme au pied du viaduc de Cormot), par exemple, généralement modifiés
Décor : Produits Heki, Noch, Woodland Scenics, Sylvia SDD

Voir le plan du réseau

Philippe Cousyn

Philippe Cousyn

Rédacteur en Chef, spécialités décor, histoire du rail français et américain

Article issu de la revue #644 de septembre / octobre 2019